Olaf Scholz et Emmanuel Macron, parviendront-ils à ce compromis tant espéré par l’UE ?
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Olaf Scholz et Emmanuel Macron, parviendront-ils à ce compromis tant espéré par l’UE ?

Le moteur franco-allemand, qui faisait tourner l’Union Européenne jadis, est en pleine crise en ce moment. En effet, le couple européen ne parle plus la même langue, et peine à se comprendre sur certains sujets pourtant cruciaux pour l’UE, dans le contexte de la guerre en Ukraine. Emmanuel Macron, le président français, reproche au chancelier allemand, Olaf Scholz, de faire cavalier seul dans cette période de crise ou l’Europe doit être uni plus que jamais.

Définitivement, la guerre en Ukraine touche de plein fouet l’Union Européenne. En pleine crise, la communauté des 27, qui peinait déjà à trouver des solutions urgentes aux conséquences de la guerre, se heurte aujourd’hui à un nouvel obstacle : le désaccord de Paris et de Berlin sur des sujets fondamentaux, comme l’énergie et la défense. Le report du conseil des ministres bilatéraux qui devait avoir lieu au Château de Fontainebleau, montre la pertinence de leurs distensions.

Olaf Scholz priorise les solutions nationales

La guerre déclarée en février dernier impacte terriblement le monde entier, notamment les pays de l’Europe. Chaque gouvernement cherche ainsi à trouver des réponses immédiates pour colmater les brèches dans leur économie. C’est dans cette dynamique que s’inscrit la politique de Berlin, dont le modèle économique est carrément remis en cause par cette crise. En quelques mois, le taux de l’inflation a grimpé de 10% en Allemagne. À cet effet, le chancelier allemand Olaf Scholz, qui a pris les rênes peu de temps avant la guerre, se trouve dans l’obligation de maintenir la stabilité de l’économie nationale.

Étant au pied du mur, Olaf Scholz semble prioriser davantage les solutions nationales que les stratégies européennes. Une démarche mal perçue aux yeux d’Emmanuel Macron qui affirme qu’il n’est pas bon que l’Allemagne s’isole. “L’Allemagne est à un moment de changement de modèle, dont il ne faut pas sous-estimer le caractère déstabilisateur. Mais, si l’on veut être cohérent, ce ne sont pas des solutions nationales qu’il faut adopter, mais une stratégie européenne”, a soutenu le président français, frustré de voir que l’Allemagne décide de faire cavalier seul pour surmonter cette crise.

Privé du gaz russe dont elle était la première importatrice, l’Allemagne s’est procuré massivement du gaz pour constituer des réserves en prévision de l’hiver. Une stratégie qui affecte encore plus l’Union européenne, car elle contribue mécaniquement à faire grimper les prix du gaz en Europe. D’autre part, la mise en place de 200 milliards d’euros pour soutenir l’économie nationale face à la hausse de l’inflation, est perçue chez les voisins européens, notamment la France, comme une manière d’augmenter la compétitivité des entreprises allemandes aux dépens des autres. Ce qui constitue une concurrence déloyale, aux yeux des autres pays européens. Ce sont entre autres des mesures internes, non sans conséquence sur l’UE.

Macron et Scholz, deux visions différentes sur la crise énergétique

À l’image de leurs traits de caractère totalement différents, leurs points de vue divergent sur de nombreuses questions sensibles concernant l’UE. D’un côté, Emmanuel Macron, plus volubile, réclame un plafonnement du prix du gaz dans le but de subventionner le gaz utilisé dans les centrales afin de réduire les factures énergétiques des pays européens. Des mesures auxquelles s’oppose Olaf Scholz, plus taciturne. “Un prix maximum fixé par l’UE comporte toujours le risque que les producteurs vendent leur gaz ailleurs et que nous, les Européens, nous retrouvons avec moins de gaz au lieu de plus”, suggère le chancelier allemand, de l’autre côté. Tandis que la France s’oppose à la construction du gazoduc Mid-CAT (Midi-Catalogne) soutenue par l’Allemagne et l’Espagne, pour des raisons économiques et écologiques notamment. 

À noter que ce projet, lancé il y a près de deux décennies, devrait coûter plus de 400 millions d’euros pour une faible rentabilité, selon une étude commandée par la commission européenne en 2018. “Je ne comprends pas pourquoi on sauterait comme des cabris de Pyrénées sur ce sujet pour expliquer que ça résoudrait le problème gazier : c’est faux “, a estimé le président Emmanuel Macron, il y a un mois. Cependant, il y a quelques jours, Paris a annoncé conjointement avec l’Espagne et le Portugal, la construction d’un pipeline qui va relier Barcelone à Marseille en passant sous la Méditerranée. Un corridor d’énergie verte considérée comme une bonne nouvelle pour l’Espagne, le Portugal, la France et l’Europe, en témoignent les propos du Premier ministre espagnol, Pedro Sanchez, a l’issue d’une rencontre à Bruxelles avec Emmanuel Macron et le Premier ministre portugais, Antonio Costa, en prélude à un sommet européen sur la question de l’énergie.

La défense, un autre point de discorde entre Berlin et Paris

Sous la présidence française européenne, les vingt-sept pays membres avaient adopté une déclaration à Versailles au printemps dernier, qui prévoyait un renforcement de la défense européenne. Depuis, les Allemands se sont orientés de plus en plus vers l’OTAN, et notamment vers les États-Unis, pour renforcer son armée. En mai dernier, le gouvernement et l’opposition conservatrice allemands ont trouvé un accord afin de moderniser l’armée nationale face à la menace russe. Un compromis qui a en effet permis à Olaf Scholz de débloquer 100 milliards d’euros pour les armements.

Et pour ce faire, l’Allemagne s’est détournée de la France, troisième exportateur d’armes, pour s’approvisionner auprès des États-Unis et d’Israël. Un choix justifié par le général en chef de l’État-major de l’armée allemande. “Je veux des matériels qui volent, qui roulent et qui sont disponibles sur le marché. Pas de développement des solutions européennes qui, au final, ne marchent pas”, a fait savoir le général Eberhard Zorn, qui, à l’évidence, préfère les matériels de guerre américains. Ainsi, l’Allemagne prévoit d’acheter environ 35 avions de chasse américains.

À ce sujet, le président français ne cache pas sa divergence. “Dépenser beaucoup pour acheter ailleurs n’est pas une bonne idée, à en croire Emmanuel Macron, appelant au renforcement de l’industrie européenne de défense. Nous avons besoin de renforcer une industrie et une base industrielle et technologique de défense européenne beaucoup plus forte et beaucoup plus exigeante”, a-t-il martelé en juin dernier.

Tout compte fait, il convient de souligner que ce n’est pas la première fois que le couple franco-allemand est en froid. Mais, les deux géants de l’Europe, qui entretiennent une longue amitié depuis la seconde guerre mondiale, ont toujours su surmonter leurs différends. Ce qu’il importe de savoir à présent, est que les deux parties, ont-elles la volonté politique de trouver un compromis pour donner ensemble une réponse stratégique à long terme à cette crise. Face à cette inquiétude, le président du Conseil européen, Charles Michel, se montre optimiste quant à la détermination des deux pays à travailler conjointement.

 

La rédaction

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