Russes et chinois, nouveaux maîtres du Moyen-Orient
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Russes et chinois, nouveaux maîtres du Moyen-Orient

Depuis quelques semaines, des experts en Relations Internationales opinent dans les médias d’un accord qui est en train d’être conclu entre la Chine, la Russie et l’Iran sur le plan militaire, mais aussi sur les ressources notamment le gaz et le pendentif pétrole 25 ans. Cet accord risquerait de limiter l’influence prépondérante des flux dans cette région riche en hydrocarbures. Pour comprendre le contexte dans lequel cet accord est signé, il faut se plonger dans les événements qui secouent cette région.

En 2011 éclata une révolution qui va basculer le monde arabo-musulman : le printemps arabe. Plusieurs dictateurs ont été renversés tels que Ben Ali en Tunisie, Hosni Moubarak en Egypte, Mouammar Kadhafi en Libye et Ali Abdallah Saleh qui a laissé le pouvoir au Yémen. D’autres pays seront ébranlés par cette révolution connaitront par la suite d’une guerre civile : la Syrie et le Yémen. Ce changement profond dans le monde arabe a occasionné la montée de deux puissances rivales : l’Iran et l’Arabie Saoudite. Ces pays se livrent depuis lors d’une lutte d’influence pour le contrôle du Moyen-Orient. L’Arabie Saoudite a toujours eu de son côté le soutien des pays incluant notamment les Etats-Unis et l’ensemble des pétromonarchies qu’elle domine.


Au-delà de tous ces conflits, l’Iran s’est toujours montré offensif face à l’occident mais plus particulièrement envers les États-Unis et Israël. D’ailleurs, la naissance de la république islamique en 1979, sa puissance et son influence au Moyen-Orient est construite autour de son opposition à ces deux pays. Au début de la révolution islamique qui a abouti au renversement du Shah et à l’avènement de ce régime, des étudiants avaient pris en otage 52 membres du personnel de l’ambassade américaine à Téhéran.

Rouhollah Khomeiny, fondateur de la république islamique

Depuis les années 1990 jusqu’aux années 2010, un autre sujet oppose l’Iran et les grandes puissances : son programme nucléaire. Tout en étant contraire aux règles de l’Islam que prône le régime des Ayatollahs, la république islamique n’a jamais démenti la velléité de développement de son programme nucléaire pour aboutir à la fabrication des armes de destruction massive. C’est ainsi que les grandes puissances ont accepté d’imposer des sanctions à l’Iran afin de la pousser à signer un accord.
Après plus de 10 ans de négociation, l’Iran a accepté de signer un accord en mars 2015 avec les USA, la Chine, La Russie, le Royaume-Uni, la France et l’Allemagne en acceptant de limiter son programme qu’au nucléaire civile.Cet accord avait provoqué l’Eire des monarchies du golfe particulièrement l’Arabie Saoudite qui voit l’Iran comme son ennemi juré.

Représentant des pays signataires de l’accord

Profitant de l’apaisement des relations avec l’occident, l’Iran a continué son expansion au Moyen-Orient en combattant l’organisation de l’Etat islamique qui a établi un califat en Irak et en Syrie. Dans ce dernier, l’Iran mène également un autre objectif en combattant au côté de Bashar Al Asad pour l’aider à se maintenir au pouvoir.
Au Liban, l’Iran soutient un groupe qui lui est historiquement fidèle : le Hezbollah. Ce contrôle politico-militaire de facto du Liban sert également de rempart contre toute attaque de l’État d’Israël sur la république islamique.
Finalement au Yémen, l’Iran a profité de la crise provoquée par le printemps arabe en soutenant les Houthis, un groupe chiite qui va prendre le contrôle de la capitale du pays, Sanaa. L’Arabie Saoudite, ne supportant pas cela vu que le Yémen est à sa frontière et voyant que son ennemi y est va s’engager avec son allié émirati à la tête d’une coalition pour soutenir l’armée gouvernementale de ce pays et mener une campagne aérienne.
Jusque-là, tout semblait bien aller pour l’Iran. Mais en janvier 2017, la situation va radicalement changer. Donald Trump arrivant à la Maison-Blanche a préféré vilipender la politique d’apaisement d’Obama envers l’Iran en menant une politique va-t’en guerre contre la république islamique. Il a préféré ainsi s’aligner sur la vision de l’Arabie Saoudite, les Emirats Arabes Unis et Israël qui s’opposent au régime de Téhéran.

Décret de Donald Trump se retirant de l’accord sur le nucléaire iranien

C’est ainsi qu’il va se retirer de l’accord sur le nucléaire iranien mais respecter par l’Iran selon l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et rétablit sur le coup les sanctions contre l’Iran. Avec ces sanctions, certaines entreprises étrangères ont été forcées de quitter l’Iran et Washington imposées à plusieurs pays de commercer avec l’Iran.
À partir de ces sanctions, l’Iran se retrouve isolé sur la scène internationale. De plus, les difficultés économiques n’ont fait qu’accroitre dans le pays. Il y a même eu plusieurs contestations contre le régime pour la crise économique qui ont été réprimées. Entre temps, il ya eu plusieurs accrochages entre l’Iran et les alliés des USA allant du blocage de pétroles britanniques par l’Iran et ceux appartenant à l’Iran par les britanniques, puis le survol du territoire iranien par un drone américain qui aa a été ensuite abattu par les gardiens de la révolution et finalement l’assassinat d’un général iranien, le numéro 3 du régime par les États-Unis et qui a provoqué une réplique de la république islamique avec le lancement de plusieurs missiles sur deux bases militaires américains en Irak.

Général Qassem Soleimani

À partir de ces événements, le régime iranien isolé sur la scène internationale et qui doit étouffer les contestations populaires à cause des contestations populaires tout en se protégeant contre les pays qui lui sont hostiles avaient le besoin de trouver un accord qui pourrait lui donner une assurance – vie.
Quels sont les avantages de cet accord pour l’Iran, la Chine et la Russie ?
Il est difficile de connaître le fonds de cet accord vu qu’il n’a pas été dévoilé par les diplomaties iraniennes et chinoises. Les diplomaties de ces pays sont opaques. Mais, selon certaines clauses qui auraient été fuitées, cet accord prévoit la vente du pétrole et du gaz à un prix inférieur en contrepartie, un investissement par la Chine de plus de 400 milliards de dollars dans l’économie de la république islamique. Cet accord aurait également permis à la Chine et la Russie de mettre une base militaire importante. Vladimir Poutine qui aurait donné sa bénédiction à cet accord aurait obtenu à son tour des privilèges commerciaux et militaires. Cependant, ce traité entrerait en violation contre les principes de la république islamique qui interdit l’installation de forces étrangères sur son territoire.

De gauche à droite : Hassan Rohani l’actuel Président iranien et Xi Jinping, Président de la république populaire de Chine

Du côté de la Chine, l’accès au pétrole iranien à faible coût est un apport important en hydrocarbures. Etant la deuxième puissance économique du monde et l’atelier du monde, elle importe plus de 14 millions de barils par jour. Sur le plan géopolitique, cet accord autorisé à la Chine et à la Russie d’asseoir leur emprise au Moyen-Orient. L’Iran, malgré ses faiblesses à cause des sanctions, une influence sur l’Irak à travers ses 120 000 combattants, et ses alliés dans le gouvernement irakien, la Syrie vu qu’il a aidé Bashar Al Asad à se maintenir au pouvoir, au Liban avec le Hezbollah et le Yémen avec les Houthis qu’il soutient sur le plan économique et militaire.

Quelle pourrait être la réaction des États-Unis ?
Depuis l’ère Obama, les Etats-Unis se désengagent timidement du Moyen-Orient parce qu’ils ne dépendent plus du pétrole des monarchies du golfe. Donald Trump de son côté montre également des signes de désengagement du Moyen-Orient. La Syrie en est un exemple car il a choisi d’abandonner les Kurdes qui ont vaincu à vaincre l’État islamique tout en étant conscient de la Turquie qui risque de les combattre afin de les empêcher d’accéder à une large autonomie voire l’ indépendance.

Donald Trump et Mohammed Ben Salmane, Prince-Héritier d’Arabie Saoudite

Avec cet accord, les États-Unis pourraient pouvoir leur présence au Moyen-Orient en étayant ses relations avec ses alliés du golf en leur vendant des armes afin de continuer à affronter l’Iran par pays interposés notamment au Yémen. Ils peuvent continuer à armer Israël pour se protéger contre le Hezbollah et se protéger contre les agressions éventuelles de l’Iran. Il faut voir dans ce scénario que ce serait le début d’une autre forme de guerre froide entre les grandes puissances au Moyen-Orient.
Autre scénario : tout en ayant cet accord avec l’Iran, la Russie et la Chine peuvent étayer leurs relations avec les monarchies du golfe. Depuis quelques années, il y a un rapprochement entre les pétromonarchies (Arabie Saoudite et les Emirats Arabes unis) et l’axe Sino-Russe. Ces derniers sont considérés comme étant des pays qui n’imposent pas des valeurs notamment la démocratie et les droits de l’homme. Ces monarchies ne font que moderniser leur système autocratique.
Quoi qu’il en soit, avec la signature de cet accord s’il a lieu, le régime des ayatollahs détiendrait une assurance de vie et pourrait continuer à mener sa politique d’influence au Moyen-Orient. Quant à la Chine et à la Russie, ils pénètrent de plus en plus dans une zone qui est sous influence occidentale depuis la fin de la première guerre mondiale et l’effondrement de l’empire ottoman. Ces pays auront leurs mots à dire dans cette région bouleversée par les crises.

Auteur

Joël Junior Beauséjour

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