Le Vatican : entre pouvoir spirituel et pouvoir diplomatique mondial

Basé au cœur de Rome, au centre même de la péninsule italienne, le Vatican est le plus petit État indépendant au monde. Avec une superficie de 44 hectares et une population inférieure à mille habitants, cette cité est construite autour d’un joyau architectural qu’est : la Basilique Saint-Pierre.

Cette basilique construite sur la tombe de l’apôtre Pierre l’un des douze disciples du Christ, mort en martyr en l’an 67, la basilique actuelle prend forme à la Renaissance, en 1505, sous l’impulsion du pape Jules II.D’une longueur de 187 mètres et d’une largeur de 150 mètres, est  la plus grande Eglise du monde. Autour d’elle gravite le palais apostolique, résidence du souverain pontife, la célèbre chapelle Sixtine, les musées du Vatican, ainsi qu’une bibliothèque d’une richesse inestimable.

Malgré sa taille réduite, le Vatican possède tout ce qu’un État moderne peut avoir : une gare, une poste, une station de radio diffusant en 33 langues et même un quotidien. Il dispose également de sa propre armée, la Garde suisse pontificale, chargée d’assurer la sécurité du pape.

Le Saint-Siège exerce par ailleurs sa souveraineté sur plusieurs bâtiments à Rome et sur le palais de Castel Gandolfo, résidence d’été pontificale située à une vingtaine de kilomètres au sud de la capitale italienne.

Une monarchie absolue de droit divin

Le Vatican est une monarchie absolue élective, où le pape, chef spirituel et temporel, est élu à vie par les cardinaux de moins de 80 ans réunis en conclave. L’élection requiert une majorité des deux tiers.

Le 13 mars 2013, le cardinal argentin Jorge Mario Bergoglio succède à Benoît XVI. Devenu François, il devient ainsi le 266ᵉ souverain pontife, premier pape non européen et premier jésuite à accéder au trône de Saint-Pierre.

Chef de l’Église catholique, le pape incarne à la fois une autorité religieuse universelle et un pouvoir d’État. Cette double nature, spirituelle et temporelle, résulte d’une histoire pluriséculaire.

Les origines du Vatican

L’origine du Vatican remonte au VIIIᵉ siècle. Alors que Rome est menacée par les Lombards, Étienne II, évêque de la ville, obtient la protection du roi des Francs, Pépin le Bref. Les États pontificaux s’étendent progressivement sur une partie de l’Italie centrale.

Mais au XIXᵉ siècle, le mouvement pour l’unité italienne fragilise cette domination. En 1870, refusant de reconnaître l’annexion de Rome par les troupes italiennes, Pie IX se replie dans le palais du Vatican. Ce différend ne sera résolu qu’en 1929, avec la signature des accords du Latran entre Pie XI et Mussolini, consacrant officiellement la naissance de l’État du Vatican.

Aujourd’hui, le Saint-Siège gouverne une communauté de plus de 1,3 milliard de fidèles, principalement répartis en Europe, en Afrique et en Amérique latine. L’Église catholique constitue la seconde plus grande religion au monde, derrière l’islam et devant l’hindouisme.

Malgré sa taille, le Vatican déploie une influence diplomatique considérable. Il entretient des relations officielles avec 184 États et dispose d’environ 120 ambassadeurs, appelés nonces apostoliques. Leur mission : défendre les intérêts de l’Église catholique et entretenir un dialogue avec tous les régimes, quelles que soient leurs orientations politiques.

Seuls13 pays n’ont pas de relations diplomatiques avec le Saint-Siège, parmi lesquels l’Arabie saoudite, l’Afghanistan ou la Chine. Le Vatican est également présent au sein de nombreuses organisations internationales, comme l’ONU ou le Haut-Commissariat aux réfugiés.

Fort d’un réseau de 5 300 évêques, 400 000 prêtres et de multiples ordres religieux, il dispose d’une connaissance fine des réalités sociales et politiques mondiales  faisant de lui l’un des États les mieux informés au monde.

La diplomatie de la paix

Dépourvu d’intérêts militaires ou économiques, le pape agit traditionnellement comme médiateur dans les conflits entre nations.

Sous la papauté d’Alexandre VI, à la fin du XVe siècle, le Saint-Siège supervise le partage du « Nouveau Monde » entre l’Espagne et le Portugal, traçant la ligne de démarcation de leurs futures conquêtes.

Plus récemment, en 1979, l’intervention de Jean-Paul II permit d’éviter un conflit armé entre le Chili et l’Argentine, en arbitrant leur différend sur la frontière du canal Beagle. En 2014, François joue un rôle clé dans le rapprochement historique entre Cuba et les États-Unis. L’année suivante, en Colombie, la médiation de l’Église contribue à la signature de l’accord de paix entre le gouvernement et les FARC.

Deux papes, deux styles, une même mission

De Jean-Paul II à François, deux figures majeures ont profondément marqué la diplomatie vaticane.

Entre 1979 et 2005, Jean-Paul II entreprend 130 voyages à travers le monde. Communicateur hors pair, il engage une véritable croisade idéologique contre le communisme. 

Le pape François, pour sa part, incarne une approche plus sociale et décentralisée. Depuis son élection, il a effectué 45 voyages apostoliques, privilégiant les régions périphériques et les pays du Sud global — une vision qui rompt avec l’eurocentrisme traditionnel de l’Église.

Son positionnement diplomatique est parfois audacieux : il a été critiqué pour sa prudence face à la guerre en Ukraine ou pour l’accord signé en 2018 avec la Chine sur la nomination des évêques — une tentative risquée de rapprochement malgré la persécution des catholiques chinois.

Promoteur du dialogue inter-religieux, François se montre également attentif au sort des chrétiens d’Orient, notamment en Irak, où leur nombre a chuté de 1,3 million en 2003 à environ 400 000 aujourd’hui.
En novembre 2024, le Vatican annonce une visite du pape en Corse, dans la cathédrale Santa Maria Assunta d’Ajaccio. Ce choix, plutôt que Paris ou Rome, illustre la cohérence de sa démarche : aller vers les marges plutôt que vers les centres de pouvoir.

François, amoureux de la Méditerranée, défenseur de l’environnement et ardent plaidoyer pour les migrants, rappelle sans cesse la vocation du Saint-Siège : porter la paix là où règnent la fracture et la peur.

Roodelin Charlotin
Source : Les dessous des cartes